Lisa Bremard
Laboratoire Polymères, Biopolymères et Surfaces, UMR 6270 CNRS,
Université de Rouen Normandie
lisa.bremard (at) univ-rouen.fr
Cette fin du mois de mai a été l'occasion de retrouvailles scientifiques à Rouen. En effet, s'est tenu le 29 et 30 mai, le 5ème congrès international sur les Modifications Post-Traductionnelles (PTMs) chez les bactéries. Cet évènement est l'occasion de se rassembler autour de cette thématique qui comprend des axes de recherche très variés avec notamment l'étude des phosphorylations protéiques, l'acétylation, la glycosylation, la pupylation, le RiPP, la dégradation ciblée et d'autres modifications, ainsi que les méthodes utilisées pour les étudier. Ce congrès s'inscrit dans l'air du temps quand on sait que les modifications post-traductionnelles (PTMs) jouent un rôle important dans la résistance et virulence bactérienne et que leur caractérisation par analyse protéomique est nécessaire. Effectivement, il s'agit d'axes de recherche qui permettent d'arriver à développer de nouvelles solutions thérapeutiques pour lutter contre l'émergence de bactéries multi-résistantes.
Ce congrès s'est déroulé en 5 sessions avec des thèmes définis et des speakers invités. En effet, des scientifiques de renom sont venus du monde entier afin d'échanger sur leurs travaux. Dans un premier temps nous avons assisté à la session portant sur les méthodes dédiées à la caractérisation des PTMs. Jean Armangaud (Université Paris-Saclay, France) a débuté cette session en nous parlant de l'étude métaprotéomique des PTMs. Il a notamment évoqué l'aspect crucial du choix des bases de données pour l'étude de l'importance des modifications protéiques. Dans la continuité de ce sujet, nous avons pu écouter Billy Bourke (Université College Dublin, Ireland) qui nous a présenté la technique FISH (Hybridation fluorescente in situ). Effectivement, il nous a présenté des modifications de l'abondance bactérienne au sein du microbiote intestinal d'enfants souffrants de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (IBD). De plus, cette équipe de recherche, a mis en évidence des modifications post-traductionnelles propres à ce type de pathologie et notamment un nombre de phosphorylations des tyrosines qui s'est révélé plus élevé chez les enfants souffrants d'IBD. Voilà pourquoi cette technique de cytogénétique pourrait être utilisée pour étudier le paysage des PTMs dans un échantillon. La session a été clôturée par l'intervention de Nicolas Nalpas sur la réutilisation des données dans le but de déduire la co-régulation des protéines et le dialogue qu'il peut exister entre les PTMs et que l'on appelle cross-talk.
La seconde session de ce congrès a porté sur l'étude des glycanes et leurs dérivés. Au cours de cette session, Christine Szymanski (Université de Géorgie, Etats-Unis) nous a parlé des infections à Campilobacter jejuni dont la cause la plus fréquente est la consommation de volaille. Chez cette bactérie, il a été observé un nombre important de glycanes greffés sur des monomères de flagelline notamment, dont la fonction reste à définir. De plus, il a été évoqué des potentiels cross-talk entre l'ajout de glycanes sur les protéines et les phosphorylations qui pourrait intervenir dans ce mécanisme. À la suite de cette présentation, Silvia Ardissone (Université de Genève, Suisse) a évoqué la glycosylation par dérivatisation de l'acide sialique de la flagelline également mais chez Caulobacter crescentus. Après la pause déjeuner, un des sponsors de ce congrès, à savoir, la société normande Afinissep a réalisé une présentation de leurs produits, largement dédiés à la protéomique.
À la suite de cette présentation, la troisième session a débuté et s'est articulée autour de l'implication des PTMs dans la réponse au stress et l'adaptation bactérienne. Pour animer ce début de session, l'invité Jean-François Collet (Université catholique de Louvain, Belgique) nous a exposé la structure et la fonction de la chaperonne GroEL dans le cadre de la protection des polypeptides Nascents pour prévenir le vieillissement prématuré. À la suite de ces présentations, la seconde partie de l'après-midi a été consacrée à la présentation des posters. Nous avons pu échanger sur les thématiques de recherches de chacun et partager nos expériences. J'ai pour ma part, présenté mon premier poster de thèse qui portait sur le phosphoprotéome de souches cliniques d'Acinetobacter baumannii. J'ai pu échanger avec des scientifiques qui m'ont apporté des nouveaux axes de réflexion, à la fois par leurs questions ou par des réflexions communes. Ensuite, nous avons eu la chance d'effectuer une visite guidée de la belle ville de Rouen, en passant par les quartiers les plus historiques. Cette journée s'est terminée sur un diner tout aussi rempli d'échanges scientifiques ou non.
La deuxième journée de ce congrès s'est déroulée comme la première, en s'articulant en sessions. Dans un premier temps nous avons pu assister à la session dédiée aux PTMs impliqués dans les mécanismes de résistance ou de virulence bactériens. La première invitée de cette journée fut Nienke Buddelmeijer (Institut Pasteur, Paris, France) qui nous a présenté les modifications des lipoprotéines chez les bactéries. Effectivement, il a été mis en lumière que ces lipoprotéines constituent une cible de choix dans le cadre de développement de nouvelles thérapies. Celles-ci passeraient par le ciblage de protéines ajoutant les lipides sur les chaines d'acides aminés, comme la protéine Lgt chez Escherichia coli. Le second invité de cette session, Sven Halbedel (Institut Robert Koch, Allemagne), a évoqué le contrôle de la biosynthèse du peptidoglycane par une phosphorylation protéique. Effectivement, il existe une phosphorylation sur la protéine MurA, intervenant dans les mécanismes de biosynthèse du peptidoglycane. Cette phosphorylation en tyrosine 7 semble essentielle pour la viabilité de Listeria monocytogenes.
Pour finir, ces deux jours de congrès se sont terminés par la session sur les rôles des acteurs de l'acylation. L'invitée de cette session fut Valérie Carabetta (Université Cooper Medical School of Rowan, Etats-Unis) qui est venue nous parler de la possibilité d'un code de type histone dans les bactéries. Effectivement, il a été question de la protéine HBsu qui possède une homologie de fonction avec les histones, mais au sein de la bactérie Bacillus subtilis. Cette protéine permettant l'organisation du matériel génétique chez la bactérie, est également hypermodifiée. Effectivement, elle a été retrouvée porteuse de phosphorylation, succinylation ou encore acétylation. Il a plus particulièrement été démontré que l'acétylation de cette protéine joue un role dans la régulation de l’expression des gènes chez la bactérie.
Cette présentation a marqué la fin de ce rassemblement scientifique. Ces deux jours ont été très enrichissants, j'ai pu découvrir de nouvelles thématiques de recherches associées à des méthodes bien spécifiques et diversifiées.
Je souhaiterais finir cette lettre en remerciant la FPS de m'avoir permis de réaliser mon premier congrès international en m'accordant une bourse. Je remercie également mes directeurs de thèse Julie Hardouin et Nicolas Nalpas, pour l'organisation de ce congrès ainsi que pour leur implication et leur soutien dans la production de ma première communication par affiche présentée en congrès. En espérant que vous ayez pris plaisir à me lire.
Lisa Bremard